Olivier, Sparring-partner puis manager de transition
Proche du coach, une nouvelle notion fait peu à peu son apparition : celle de sparring-partner. Terme emprunté au milieu du tennis et de la boxe entre autres, le sparring-partner est en quelque sorte un coach-consultant impliqué de manière globale.
J’appelle aussi mon rôle « associé en freelance », car j’ai la posture d’un associé. A la différence d’un coach, je donne mon avis sur le business et la situation. A la différence d’un consultant, je ne fais pas d’audit. Je « vis » aux côtés du dirigeant. Ensemble nous réfléchissons, nous prenons des décisions, nous avançons pas à pas.
Comment es tu arrivé à la fonction de Sparring-Partner ? Quelle fonction as-tu ? Ton rôle ?
Parfois les dirigeants me trouvent car ils cherchent un coach, mais en même temps ils savent que ce n’est pas tout à fait cela. Je ne suis pas coach, je suis entrepreneur.
J’ai commencé ma dernière mission début 2018 auprès du dirigeant d’une entreprise familiale et ensuite j’ai très vite travaillé avec les équipes.
Le projet a évolué et la question de la transmission est arrivée.
Avoir un Sparring-Partner a permis de mettre le doigt sur le constat que le dirigeant aspirait à vivre une nouvelle aventure. Il avait probablement déjà fait le constat lui-même, mais entre le penser, le dire, et le faire il y a parfois un monde.
Deux voies se sont ainsi ouvertes : prendre de la hauteur, ou transmettre. Dans les deux cas, il était nécessaire d’ajuster la gouvernance de l’entreprise.
Ensemble nous avons fait ce chemin. En repensant petit à petit les modes de fonctionnement, en déployant la subsidiarité. C’est un chemin subtil, pour le dirigeant, mais aussi pour les équipes.
En novembre 2020 l’entreprise est rachetée.
Depuis j’ai une fonction de manager de transition.
Je n’avais pas le profil linkedin « bankable » pour diriger cette entreprise, mais en même temps, c’est assez naturellement que nous avons conclu que c’était une bonne idée. Finalement, à mes yeux c’était un bon moyen d’aller au bout de ma mission aux côtés du dirigeant : fluidifier la transmission et lui permettre de partir serein.
J’assure la direction générale le temps de la transition. Le temps que les entreprises fassent connaissance.
C’est aussi la période où nous devons apprendre à travailler sans le « dirigeant historique » et avec une plus grande entreprise.
Mon commanditaire aujourd’hui n’est plus le dirigeant cédant, mais le nouveau propriétaire de l’entreprise.
Quelles sont les conditions pour que cela soit compris par les équipes, les clients, les fournisseurs ?
Ecouter. C’est la base.
La tentation de tout révolutionner arrive vite. Écouter c’est admettre que malgré notre avis, on ne sait pas. C’est d’autant plus important dans un rôle de transition, car ce qu’il faut à tout prix éviter c’est de mettre en place des projets qui ne sont pas assez solides et qui pourraient être remis en cause par la prochaine direction. Ce n’est pas une question d’égo personnel, c’est une question de respect des équipes et de performance de l’entreprise.
Permettre, c’est la suite.
Quand tout le monde sait que l’on ne reste pas, on peut rapidement penser « ça sert à rien de le suivre, il va changer ». L’écoute permet de réduire cela. Mais en permettant aux équipes de déployer leurs expertises et de prendre en main leur poste alors on montre que si le DG impulse, c’est bien les personnes qui ont leur poste en main. Ça n’empêche pas de mener de vrais changements, parfois rapidement, c’est même souvent bien plus rapide et plus puissant comme cela.
Et la gestion pendant la pandémie et son confinement ?
A ce moment-là, je n’étais pas DG. Cette période était intense, et on a vu la force du CODIR que nous avions mis en place l’année précédente. Je l’ai animé tous les deux jours.
Avant de réunir le codir, avec le dirigeant nous avons posé deux objectifs très clairs : 1 Protéger nos salariés et nos clients 2 Préserver l’activité économique.
Connaissant nos objectifs, les équipes de l’entreprise ont mieux compris nos décisions et ont accepté aussi les virements de bords au gré de la situation. Tous les salariés ont été incroyablement présents et combatifs.
Quels avantages vois tu d’avoir un sparring partner pour l’entreprise elle-même au delà de ceux pour le dirigeant ?
Les premiers mots de l’équipe ont été : «Tu nettoies les lunettes » !
Chacun devant ré-expliquer son métier, son rôle, on peut voir rapidement ce qui peut être amélioré, revu. Étant extérieur, on peut mettre les deux pieds dans le plat, car notre parole est libre, il n’y a pas d’antécédent.
Etre à la fois Sparring-Partner et manager de transition permet une phase de transition, une passerelle pour accompagner le changement de direction.
Il y a tout de même à faire attention de ne pas imprégner trop fortement sa marque, les équipes devant prendre la leur.
Une évidence est que cette solution est moins risquée financièrement car je suis en dehors des effectifs et des obligations. Le dirigeant peut reprendre la main quand il le souhaite. Mon contrat a toujours été précaire et sans préavis. Quand je ne suis plus utile, c’est que ce que je pouvais apporter est apporté. Je pars. Pour le client c’est une sécurité. Pour moi ça m’évite de laisser trop de place au syndrome de l’imposteur !
Et demain ?
Pour l’instant je suis là, pour encore plusieurs mois. Mais je sais que cela va être dur de partir ! Car je suis un homme de relation qui s’investit à 200%. Ce sera une étape personnelle. Mais je l’ai déjà vécue et je dois l’accepter, c’est la face moins sympa du métier…
Nous te souhaitons, Olivier, une transition la plus souple possible pour finir ta mission et pour en reprendre une nouvelle !
Propos recueillis par Delphine Trioux