Le 16 mars 2020 bouleverse l’activité professionnelle des indépendants
Le confinement pour lutter contre le Covid19, un événement qui bouleverse les vies professionnelles de tous. Témoignage de Murielle, membre du réseau BtoB RES-SOURCE des Pays de la Loire et Ille et Vilaine. (Propos recueillis par Delphine Trioux Fondatrice et animatrice du réseau). Mai 2020.
Peux tu te présenter :
Je m’appelle Murielle Jarry
Mon métier : Structuration commerciale (France et International)
Je m’adresse aux entreprises de la région PDL, industrielles, des secteurs de l’équipement, alimentaire ou encore du nautisme.
Que s’est il passé à l’annonce du confinement le 16 mars ?
Le 16 mars baisse du rideau de l’activité professionnelle.
La semaine précédente avec mon conjoint on s’est dit qu’il fallait se protéger et qu’un moyen évident était de mettre un masque.
L’Italie a marqué nos esprits. Si ils ont vécu cela on s’est dit qu’on pouvait le vivre avec la même ampleur. Avec mon regard et mes connaissances des pays de la zone asiatique où économie et état sanitaire pouvaient se poursuivre c’était en partie par la pratique courante du port du masque.
Dès début mars le port du masque est devenu une évidence. Je couds depuis plus de 35 ans j’ai décidé très tôt qu’il fallait équiper l’entourage proche.
Le 16 mars, on a changé de dimension, il y avait un grand besoin, une urgence pour tous.
Qu’as tu décidé?
J’ai décidé de m’investir pour fournir des masques pour les personnes au front.
Une évidence. J’ai ressentie une énergie positive.
Je souhaitais créer un produit adapté au besoin, réfléchir au matériau optimum et mettre en place le système pour fournir les bénéficiaires et trouver les donateurs de temps et de savoir-faire.
J’ai juste transposé ce que je suis dans mon métier et ce que je sais faire à un besoin qui est apparu. Je considérais que j’avais une partie de la solution. Convaincue que ça allait marcher car j’avais identifié les conditions optimum pour que ça marche.
Comment cela s’est organisé ?
Une affaire de famille !
Au départ à deux. Avec mon mari (Hervé est prestataire de service contrôle réglementaire dans l’industrie).
Chacun de nous deux a sollicité son réseau pour aller chercher des couturières bénévoles.
Nous devions mettre en place des outils de communication (flyers..) pour faire connaître l’action, recruter des couturiers, et identifier les structures en demande.
Un site internet www.masque-pour-tous.fr simple a donc été créé pour l’occasion à destination du public pour le sensibiliser et pour permettre de recruter des donateurs (couturiers, logisticiens, fournisseurs de matériaux) : on y trouve les informations de base (la nécessité de porter un masque, quel type de masque, comment le fabriquer dans le contexte du confinement…)
Il a fallut aussi canaliser : préciser que l’on s’adresse aux besoins des professionnels de 2èmeligne (les livreurs, caissiers…)
Au départ nous avons été mal reçus même par ceux qui ressentaient le besoin de se protéger.
Une page facebook masquelibrecovid19 pour faciliter l’animation de la communauté
Ma fille a créé le logo et un ami le visuel sur le site.
Ma mère couturière professionnelle a été réquisitionnée aussi même si au départ elle n’était pas confiante totalement dans le fait de l’intérêt de devoir porter un masque.
J’ai expérimenté la fabrication et procédé à une amélioration continue tout cela en l’espace de 4 semaines.
Un process a été établi pour structurer notre action :
– un mail de réponse type : démarche, où trouver le tissu (donateurs des draps, nappes 100 % coton, du fil).
Chaque couturière fait appel à don de tissus auprès de ses voisins.
– un modèle est proposé aux couturières. Ce modèle été validé par l’utilisateur final.
– un engagement sur une quantité de masques à coudre (10, 20 ou plus) chaque semaine. La seule obligation de déplacement était d’aller chercher l’élastique acheté très tôt par mon mari qui avait anticipé la tension sur ce matériau.
Et enfin un relais géographique pour que chacun puisse récupérer les stocks au plus près de son lieu de confinement.
Quelques chiffres :
2900 masques fabriqués
Au plus fort une 40aine de couturières (dont 2 hommes) localisées majoritairement sur la région nantaise pour la facilitation logistique due au confinement.
Tes plus belles satisfactions ?
Le moment du don des masques, par exemple à la maison de retraite du quartier. Les professionnelles étaient touchées de voir que l’on avait pensé à elles et leur retour validant nos exigences d’un produit bien conçu, utile et qui sauve.
Les personnes bénévoles qui se sont présentées étaient de différents profils : Personnes âgées retraitées ou en activité, des jeunes de – de 30 ans (10 %). Plutôt des personnes de milieux favorisés. (Une découverte : beaucoup de gens sont équipés de machines à coudre ! ).
Cette action a provoqué des rencontres improbables !
Aujourd’hui le confinement a pris fin, l’aventure est elle terminée ?
L’action était imaginée plutôt pour du court terme. Mais elle se poursuit ! Depuis le dé-confinement, il y a toujours énormément de besoins plutôt des demandes d’associations. Ca s’intensifie dans les quartiers populaires de Nantes. Les associations ont un rôle car il y a une pédagogie à transmettre dans le port du masque.
Quand nous aurons terminé, il nous restera à marquer l’aventure avec l’ensemble des bénévoles : une rencontre physique et un dédommagement grâce à la cagnotte que nous avons lancée.
Et ton activité professionnelle ?
J’ai eu tout de même un client qui est resté actif et fidèle à mes services ce qui m’a fait garder un pied dans mon activité mais cette expérience conforte ma réflexion vers de nouvelles orientations. Toujours dans la structuration commerciale certainement mais peut être avec une ouverture sur les questions environnementales.